Féministe, avocate, militante anticoloniale, Gisèle Halimi, née au sein d’une famille juive tunisienne, est une figure française majeure de la seconde moitié du XXe siècle. Une élève du collège Clémence Isaure a écrit son portrait dans le cadre de l’atelier mené par Chouf Tolosa avec cet établissement (voir notre article à ce sujet). Nous le publions aujourd’hui à la suite des portraits de Rachid Taha, Mendel Langer, Sanité Belair et Alfred Nakache. Les autres textes des élèves sont à retrouver sur ce lien.
Gisèle Halimi est née à Tunis, le 27 juillet 1927. Elle passe son enfance en Tunisie où elle est la meilleure de sa classe. Plus tard elle veut être avocate. En 1945, Gisèle Halimi a 18 ans et arrive à Paris. Elle s’installe à Clichy-la-Garenne chez un ami de son frère. Elle donne le peu d’argent tunisien qu’elle possède à son hôte afin de les convertir en franc. Mais il garde l’argent et la met à la porte. Gisèle continue malgré tout ses études en travaillant comme téléphoniste au standard américain de Paris-Militaire. En 1946, elle tombe enceinte. Refusant catégoriquement d’avoir un enfant, elle avorte illégalement dans les pires conditions : « L’un de mes plus abominables souvenirs », écrit-elle.
En 1948, Gisèle regagne Tunis avec son diplôme de droit. Elle est embauchée dans l’un des meilleurs cabinets de la ville en temps qu’avocate stagiaire, après avoir brillamment remporté le concours d’éloquence (nécessaire pour tout.e avocat.e). En 1949, elle se marie avec Paul Halimi et aura deux fils.
Une figure récupérée par le gouvernement et détestée de l'extrême-droite Au printemps dernier, en plein mouvement social sur les retraites, une double polémique est venue s'installer autour de la figure emblématique de Gisèle Halimi. Le président Emmanuel Macron a en effet organisé un hommage à la militante et annoncé que le processus vers sa panthéonisation était toujours en cours, ce qui a fait réagir à plusieurs niveaux. D'un côté, son propre fils, Serge Halimi, journaliste ancien directeur du Monde diplomatique, a dénoncé l'hypocrisie du gouvernement en déclarant : "alors que le pays est mobilisé contre une réforme des retraites extrêmement injuste dont les femmes qui occupent les métiers les plus difficiles seront les premières victimes, ma mère aurait défendu leur cause et manifesté à leurs côtés. Le 8 mars, ce sera la meilleure façon d’honorer sa mémoire et ses combats". D'un autre côté, les cadres du RN et de l'extrême droite ont remis en question la légitimité de cette célébration, évoquant son engagement militant anticolonialiste, notamment auprès du FLN durant la guerre d'indépendance algérienne. La rédaction de Chouf Tolosa
Dès 1953, elle participe à la défense de 57 Tunisiens accusés d’avoir massacré des gendarmes lors d’une émeute. « Ces procès me révoltaient. Fabriqués de toutes pièces, ils ne respectaient en rien les droits de la défense, c’était un simulacre de la justice », dit-elle. En 1956, Gisèle se sépare de son mari et s’inscrit au barreau de Paris. La même année, elle s’engage dans la défense des militants du Front de Libération National Algérien. Notamment celle des accusés des massacres d’El Halia. Le procès le plus retentissant est celui de Djamila Boupacha accusée d’avoir posé une bombe dans une brasserie d’Alger. Violée et
torturée par les soldats français, Djamila demande à Gisèle de la défendre. Durant ce procès en 1958, elle rencontre Simone de Beauvoir qui l’accompagne jusqu’à la libération de Boupacha en 1962.
En octobre 1972, commence le procès de Bobigny : Claire Chevalier, 16 ans, dénoncée à la police par son violeur est accusée d’avoir avorté avec le soutien de sa mère et de trois autres « complices ». Le procès devient politique et l’acquittement des cinq femmes ouvre la voie à la loi du 17 janvier 1975 sur
l’Interruption Volontaire de Grossesse, défendue par Simone Veil. Gisèle Halimi est désormais une avocate célèbre.
En 1981, proche de François Mitterrand, elle est élue lors des élections législatives de 1981, un mandat
qui dure jusqu’en 1984. En 1982, elle obtient le vote d’un article de loi autorisant des quotas par sexe aux élections. L’article fut finalement annulé.
Gisèle Halimi meurt le 28 juillet 2020, âgée de 93 ans.
Louise
Sources : Gisèle Halimi, une jeunesse tunisienne, une BD de Danièle Masse et Sylvain Dorange (Editions Delcourt); Wikipédia.